Un voyage, une nouvelle page pour s’évader

Premier atelier nomade de la saison 2021-2022 au Bistrot Saint-Florent

Voyage au long cours, on explore le format court de la carte-postale à la nouvelle

Voyage en terre d’écriture avec Marie

Mon amour,

Sans toi, ici, le monde est bien vide.

Pourtant chaque pas dans la ville me rappelle ceux que nous avons faits ensemble.

Je suis même allée manger dans ce petit restaurant du bord de mer où tout était si épicé.

Comme tes baisers….

Salomé

Le voyage

         Le voyage, c’est prendre le train dans une petite voiture rouge, se préparer à relâcher, à rencontrer des tempêtes, des bourrasques, désirer un ailleurs, changer d’horizon, laisser ses angoisses, les abandonner sur le quai et si elle s’agrippent, les envoyer balader par la fenêtre.

         Déjà les épices, les visages, les goûts, les odeurs pénètrent l’intérieur de la petite voiture rouge, ils m’enivrent, me chahutent, m’invitent à laisser la vieille peau derrière moi.

         Fatigue, relâchement, excitation….. Le rouge de la voiture entre dans mon crâne, mes yeux s’habituent à ce soulèvement de feu et je me laisse aller sur la banquette, absorbée dans le rouge velours dans lequel je sombre comme dans un océan violemment doux.

         Je pars, je quitte la rive, l’immensité m’appelle.

Je ne sais dans quel port j’arriverai, seul le désir d’ailleurs me guide et m’emporte.

Marie

Voyage-Nouvelle

Longtemps, je me suis trompée de bonheur. J’ai travaillé dans un atelier de confection, à coudre du matin au soir. A user mes doigts sur la machine à coudre.

Est ce que j’aimais ce que je faisais? Je crois bien que je ne me suis jamais posé la question.

Il fallait le faire, c’est tout. Se lever le matin, aller travailler, gagner des sous.

Quand mon mari est mort, mon petit dernier avait trois ans, alors je peux vous dire que je n’avais pas le droit aux états d’âme. Sylvia avait dix ans et Stéphane 8. Il fallait continuer d’avancer.

Maintenant que j’y pense, je crois que je ne me la suis jamais posée la question du bonheur.

La jeune femme en face d’elle la regarde et l’écoute attentivement.

Qui est cette femme qui lui parle en agitant ses mains?

Très doucement, elle lui demande:

« Et maintenant, si vous vous posiez la question, ne pas se tromper de bonheur, ce serait quoi ? »

La vieille dame lève les yeux vers le plafonnier du wagon.

Elle sont seules, toutes les deux, face à face dans ce wagon qui les emmène vers le nord, vers Boulogne sur mer, où chaque année, à la Toussaint, Lucienne va déposer des chrysanthèmes sur la tombe de son mari, face à la mer.

De là où il est, il voit l’Angleterre, aime-t-elle à répéter. Il est un peu en voyage.

Lucienne garde les yeux rivés sur le plafonnier.

« Ne pas se tromper de bonheur, ce serait quoi ? »

La phrase résonne dans sa tête comme une ritournelle entêtante.

« Bonheur, bonheur, bonheur…. Les gens heureux n’ont pas d’histoire… »

Lucienne regarde cette belle jeune femme qui patiemment attend sa réponse, peut-être.

Elle ressemble à ces jeunes filles qu’elle a vu défiler dans son atelier de confection: longues, fines, gracieuses. Elle enviait leur vie si facile.

Si elle osait, Lucienne lui dirait qu’elle porte le visage du bonheur.

C’est surtout sa douceur qui emplit la cabine du wagon, comme si la vie ne lui a jamais demandé d’efforts.

La jeune fille parle en premier:

« Sur votre visage, je lis une vie pleine de rencontres, d’efforts, de luttes mais aussi de bonheurs. Vous savez, le bonheur est un mot fourre-tout, on y met ce qu’on veut. Moi, mon plus beau souvenir de bonheur, c’est la main chaude de ma petite fille quand je l’emmène à l’école. »

Elle se lève et furtivement disparait dans le couloir. Lucienne entend résonner son dernier pas.

Marie

Voyage en terre d’écriture avec Yoan

Écriture automatique temps court  sur le thème du voyage

Le voyage c’est s’enivrer de beaux endroits étrangers. C’est partir de ses visions en rêve, pour gagner  la réalité tangible d’un ailleurs. C’est passer du mythe à la réalité en allant humer un monument, sentit l’odeur d’une plage, s’imprégner de la moiteur d’une capitale lointaine.

On absorbe ce que ce lieu dégage, et on renifle ce que les murs peuvent dire de son histoire, nous rencontrer et témoigner. Cela peut être un endroit chargé d’une présence, ou encore un espace complètement inattendu, qui vient même nous chercher peut-être encore plus fort que l’effort que nous avions déployé pour aller à sa rencontre au bout des mondes.

Yoan

4 cartes postales

Bons baisés du Japon, les locaux sont aussi psychorigides que délicieusement accueillant. Je vis dans un manga à ciel ouvert. Hâte de le partager avec toi un jour peut-être

*

J’ai trouvé ma cabane au Canada. Je suis devenu amoureux des chemises à carreaux. Le sirop d’érable  à quelque chose d’écœurant. Quand irons-nous couper du bois ensemble dans la forêt ?

*

Petite pensée du Tibet avec ce qu’il me reste de cerveau. Je me sens Alexandra David-Néel, mais l’exotisme en moins. J’ai prévu de te rapporter des babioles chinoises bon marché en guise de souvenir ! de toute façon il y a que cela de partout !

*

Bonjour de Birmanie sous des kilos d’or au mètre carré. Mon dieu ! Bouddha doit être le directeur de Fort Knox c’est certain. A mon retour, c’est promis, on cultivera ensemble une RICHE vie spirituelle.

Yoan

Brève nouvelle (photo inspirante / univers concentré / une seule situation / petit nombre de personnages / intro et chute suggérées)

Longtemps je me suis trompé de bonheur. J’ai beau avoir soixante-dix ans passés, j’ai décidé de franchir le Rubicon et tirer radicalement un trait sur ma vie d’avant.

Un taxi m’a déposé anonymement à proximité d’une agence de reconversion pour femmes blasées, institution clandestine dont on pouvait décoder l’adresse camouflée sur une page de publicité pour un produit esthétique dans Marie-Claire.

J’ai pris mon courage à deux mains, abandonné mari flétri et enfants égocentrés, pour me lancer dans cet ambitieux voyage d’un changement de destinée. Certains changent de sexe, moi je change de famille et ainsi va la vie.

Sur le trottoir, je vois que trois consœurs font déjà la queue en file indienne, attendant en toute discrétion l’ouverture des portes de cette agence sans aucun tape-à-l’œil. Ne connaissant pas trop la procédure, je me suis risqué à demander à ma voisine si nous pouvions adopter  absolument tous types de familles de son choix.  Elle me rassura aussitôt en me promettant hilare qu’il n’y avait absolument aucune restriction. Elle-même avait dû supporter de partager sa vie avec un mari païen et allait se faire adopter comme matrone d’une famille amish en Amérique du sud, contexte familiale plus en accord avec ses toutes nouvelles convictions évangéliques. Elle ne supportait plus les mauvaises manières de son mari, en ceci nous étions très semblables. Elle m’interpella sur le fait que je n’avais qu’une toute petite valise en guise d’unique bagage pour me lancer dans un si grand nouveau départ. Je lui ai alors expliqué que j’avais dû quitter en catimini.

Yoan

Voyage en terre d’écriture avec Sabé

Histoire en cartes postales

1

Coucou Pacco,

toujours en Alsace, mes dernières semaines de travail. Je n’en peux plus de cet odeur de choucroute qui vient du resto en face. J’ai hâte de partager des moules-frites avec toi. Bisous, S.

2

Bonjour Pacco,

il m’aurait resté un jour de trajet, mais ma petite voiture est tombée en panne. Le garagiste m’a promis de la réparer au plus vite possible.

L’hôtel a des canapés en velours rouge très confortables. À très vite, j’espère, S.

3

Mon cher Pacco,

j’ai attendu en vain. Ma voiture ne redémarrera jamais. J’achète une nouvelle – d’occasion – début de la semaine prochaine. Savais-tu qu’il font une très bonne omelette aux truffes ici? Je t’embrasse, S.

4

Mon Pacco si loin,

je suis bien arrivée chez toi. J’ai trouvé la clé, le chat va bien. J’espère que tu as bien atterri à Londres et que les négociations imprévues ne durent pas trop longtemps. Coucou de la voisine, ce soir on va passer chez „La Caravelle“, manger des moules-frites sur la terrasse. À … quand?, S.

Sabé, octobre 2021

Et si sa plume s’échappe…?

Le voyage, c’est l’échappée belle. Tant qu’elle aime sa famille, tant qu’elle est engagée dans son travail, c’est le moment qu’elle va se donner pour son écriture. Cadeau précieux pour cette femme si chargée dans sa vie quotidienne.

Elle a bien choisi un lieu dans le Sud qu’elle connaît depuis longtemps. Pas besoin de nouvelles impressions, bien au contraire : elle a besoin de vider sa tête, faire couler l’encre sur les feuilles blanches qu’elle a mises dans sa valise. Se faire le plaisir, se détendre et tranquillement écrire, prendre soins de ces événements vécus …

Du moins, c’est ce qu’elle avait prévu …

Sabé

L’Oncle de l’Ouest

Elle me rappelle sa mère, Sylvia.

Je lui ai dit au revoir, il y a sept ans, pour aller voir nos parents à Munich. Sylvia, enceinte de 9 mois, ne pouvait pas m’accompagner pour la fête de leurs 25 ans de mariage. Des journées de fête inoubliables, mais pour des raisons inattendues.

C’était au mois d’août 1961, je suis parti de Dresde, de la même gare que celle où je me trouve aujourd’hui. Alors que nous nous retrouvions en famille le matin du 14 août, nous avions appris qu’un mur allait désormais séparer les deux Allemagne. D’un instant à l’autre, Sylvia, ma petite sœur s’est retrouvée d’un côté, de l’autre coté, le reste de la famille tout à notre fête. Au soir de ce même jour, un télégramme nous a annoncé la naissance de Nina.

Depuis lors, sept ans ont passé. À l’époque, j’ai décidé de rester dans la partie ouest de l’Allemagne. Chaque année, j’ai rendu visite à Sylvia et j’ai pu voir grandir Nina. À chaque fois, dans mes valises : des oranges et des bananes, deux grands paquets de café. Des vêtements d’occasion mais toujours de qualité, comme neufs, des collants et pour ma sœur son savon préféré, des feutres, un assortiment de briques Lego ou un puzzle pour ma petite Nina et surtout des chocolats et des chewing-gums.

Je n’ai pas d’enfants à moi et je vois grandir Nina à distance, restant son „Oncle de l’Ouest“.

Ma petite sœur chérie vient de garer la voiture sur le parvis de la gare de Dresde.

Je suis pressé, on a trop tardé à faire soigneusement mes valises, à emballer la vaisselle en porcelaine pour notre mère, les disques de musique classique pour notre père. Ce sont des cadeaux achetés de mon échange obligatoire imposé pour les visiteurs en provenance de la RFA.

Il faut que je me dépêche, mon train ne va pas m’attendre – contrairement aux contrôles à la frontière auxquels je ne pourrais jamais m’habituer.

Nina doit attendre dans la voiture, elle me regarde avec des yeux si tristes. D’un dernier coup d’œil, je la vois ronger les ongles de sa main droite. Petite main si douée dont je porte dans mon sac de voyage les petits dessins qu’elle a fait pour les grand-parents dans un pays étrange.

Sabé, octobre 2021

Voyage en terre d’écriture avec Sabine

 Aéroport de Bâle, le bruit des avions, la foule. J’attends d’embarquer pour mon premier voyage seule. Je suis libre, de cette liberté de femme occidentale, qui a mené de front vie professionnelle et vie familiale pendant 30 ans, puis se retrouve soudain seule.   Tout est prêt, organisé depuis des mois, mon sac parfaitement rangé, un dernier SMS de revoir, je suis si parfaitement préparée, et puis j’ai l’habitude de voyager ; j’ai peur. Ce sera un voyage long, six mois, peut-être plus, un voyage pour apprendre à s’assumer autrement. Je goûte ce mélange de puissance, tout est possible aujourd’hui, et d’incertitude qui me pique un peu le bas du ventre. Je me dis : je suis seule et j’aime ça !  En face de moi, une jeune femme est assise, entourée de bagages volumineux. L’air très inquiet, elle me dit : vous prenez aussi le vol pour Lomé ?  – oui  – Je rentre dans ma famille à Kpalimé, j’espère que le vol n’aura pas de retard, croyez-vous qu’ils vérifieront le poids des bagages ?…J’espère … La suite de ses paroles se perd dans l’aéroport, je n’écoute plus, mais je sais qu’elle rentre chez elle et que mes premiers pas l’accompagneront jusqu’à Kpalimé.  

Sabine

Voyage en terre d’écriture avec Régine

Garage-Band

À partir de l’image des gens sur le bateau…

Juliette, veuve, 47 ans, vit à Marseille, tient un garage.

Sur le bateau qui l’amène en Corse elle prend le soleil en fermant les yeux.

Elle a eu des amants. Pas d’enfant. Au garage elle mène son petit monde. Le soir elle fume des joints sur la terrasse de sa villa. Juliette dépense beaucoup d’argent en lingerie fine et en chemisiers très féminins. Les voitures sont parfois payées en lingots d’or. Elle les cache dans le faux plafond de sa maison.

« Longtemps je me suis trompée de bonheur ». Je pensais qu’il fallait avoir un vrai métier, de l’argent, un mari, des enfants, bref, être bien établie. Quand j’ai rencontré René j’étais jeune. J’étais fille unique je n’avais pas fait d’études, et mes parents m’avaient encouragée dans cette voie qu’ils avaient choisie pour eux-même, cinquante ans plus tôt.

René était garagiste. Il avait quinze employés, tous mécaniciens. C’est aussi pourquoi je me suis retrouvée derrière la caisse. Une place laissée vacante, ce qui indisposait les clients quand ils voulaient récupérer leur voiture. Une estrade était dissimulée derrière le comptoir. C’est là que je régnais. L’espace était mieux chauffé que les ateliers. Il y avait une machine à café filtres, un petit bureau recouvert de documents et à l’arrière les toilettes.

De là je voyais chacun des employés. Un décor aux dominantes bleues roi. Un ballet d’hommes circulant, se couchant sur le sol, levant les bras, plongeant la tête dans le capot des voitures. Ça a duré vingt ans ! Renée est mort. J’ai repris le garage. Je ne voulais pas laisser tomber le personnel. Trop de familles auraient été touchées.

La clientèle était composée de gens riches. Ça se voyait aux voitures. Des Berlines, des décapotables. L’argent rentrait et cela me procurait une certaine fierté. Nous n’avions pas eu d’enfant avec René et après lui, je n’avais pas le cœur à tomber amoureuse. J’éprouvais une grande satisfaction à collectionner les amants d’un soir, deux tout au plus !

Ce jour-là nous étions un mardi. Comme chaque semaine, je partais en bateau en Corse pour livrer une voiture à un client dans sa résidence secondaire près de Porticcio. Sur le pont du bateau, les yeux fermés, je tendais mon visage au soleil. Je rêvais sans me préoccuper du monde autour de moi. À un moment j’ai pourtant senti un regard appuyé, je pourrais dire un souffle. J’ai ouvert les yeux et me suis retrouvée tout proche de ceux d’un homme. Il me souris.

-Vous dormiez je crois ?

-Non

– Excusez-moi. J’ai pris plaisir à regarder votre visage.

Silence.

-Ne vous gênez pas surtout !

-La beauté me fait du bien.                                                                                                              

Son regard profond m’attire. Un dernier pas et je me retrouve dans ses bras.

Régine

Voyage en terre d’écriture avec Élisabeth

1954, mon père rentre d’Indochine après 3 ans d’absence. Il reçoit une mutation pour le Maroc. Il dirigera un bordge militaire à l’Oukaimeden et nous habiterons Marrakech. Il y a un lycée Français et on pourra poursuivre nos études. Pour toute la famille c’est l’euphorie. Tout est exaltant, l’ivresse  d’un nouveau pays, le désir de connaître des saveurs nouvelles, la joie de vivre une vie de famille et de prendre l’avion. Je me fais des films, moi qui ne suis jamais allée au cinéma et qui ne sait même pas situer le Maroc sur une carte. Mes copines m’envient, ma grand-mère est triste mais je lui écrirais.

Marseille, le monde, le bruit, la saleté, la peur de me perdre. Je pose des questions, ma mère ne répond jamais. « Tais toi tu me fatigues ». Si j’insiste elle me pince. Mon voyage me semble plus phénoménal que d’embarquer pour Mars. Et l’atterrissage plus spectaculaire. Chaleur torride, femmes voilées, enfants morveux, dépenaillées, avenues avec des orangers ou des palmiers. Les premières frontières entre la ville arabe, le mellah juif et notre ghetto militaire dans la cité. La voix du muezzin qui me réveille à moitié à l’aube et me rappelle que je dois faire ma petite communion dans un pays musulman. Est-ce que je rêve? Tout m’angoisse. La médina et les charmeurs de serpents, la circulation très dense etc. Je fais honte à mes parents car je parle toujours de Chamonix. Je vois de la neige sur la boite aux lettres repeinte en blanc alors qu’il fait 50 degrés à l’ombre, je ne sais pas dire 10 mots d’arabe alors que mes sœurs se débrouillent avec le jardinier ou l’aide ménagère, je n’arrive pas à manger du couscous avec les doigts. Je n’aime que les escapades avec mon père. Je suis la plus petite française à avoir gravi le Toubkal, le plus haut sommet d’Afrique du Nord. Je gagne toutes les compétitions de ski. Mais je ne suis pas heureuse car je me dis que je suis un peu «une exilée».

1956, il est 5 heures du matin, des bruits inhabituels me réveillent. Ma mère parle tout doucement avec un inconnu. A-t-elle un amant?  « Vous n’irez pas à l’école aujourd’hui ». Je me réjoui et replonge dans les bras de Morphée. Des allées et venues continuent, un remue ménage étrange s’installe, mais rien n’est dit. Mon grand père très âgé et la sœur de mon père débarquent de Suisse, mais le mystère reste entier. Les langues ne se délient pas. Les adultes sont terrorisés mais semblent vouloir nous tenir à l’écart des événements. S’agit-il de problèmes entre le Maroc et l’Algérie ? Les ordres arrivent. Ma mère décrète que nous allons veiller avec les militaires le cercueil de mon père. Des gerbes de fleurs emplissent la pièce, l’odeur est écœurante. Je trouve ma mère cruelle, mais il faut obéir. Le lendemain, nous défilerons sur les chars de l’armée, avec les régiments dans lesquels mon père a servi ou commandé. C’est un héro, il est mort pour la Patrie, son nom figurera sur le monument aux morts à Servoz.  C’est le seul discours de ma mère, qui refusera même que nous pleurions à chaudes larmes. « Nous avons autre chose à faire que de pleurer ».

Il était ma famille, mais il ne m’était pas familier.  J’ai beaucoup de mal à convoquer des souvenirs, des expériences, alors je lis des livres sur l’Indochine, des revues militaires ou l’on cite sa carrière exceptionnelle, je regarde des photos car c’est moi qui suis la gardienne de tous les objets qui le représentent. Mon questionnement maintenant est plutôt de m’imaginer qu’elle aurait été mon destin s’il avait vécu ?

Élisabeth

Les lectures infusions d’extraits pour cet atelier :

  • Extrait du livre « Entre ciel et terre » de Jon Kalman Stefanson – Édition Broché
  • Extrait du livre « L’infra-ordinaire » de Georges Pérec – Édition du Seuil
  • Extrait du livre « passe-passe » de Martine Lombard – Édition Broché